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mardi 30 mai 2017

Anna Yaroslavna, Juliette Binoche et Lessia Oukraïnka ou comment Emmanuel Macron s'est fait avoir comme un bleu





Nous garderons à l'esprit que le Français est généralement ignare, imbu de l'importance de son jugement et par conséquent arrogant dans ses errements.

Imaginez que je vous dise : "Juliette Binoche et moi sommes en couple. Et c'est la plus belle histoire d'amour qui soit au monde. Avec ma petite Juliette, c'est à la vie, à la mort."



Mais ce que je vous dis là est-ce vrai ? La meilleure façon de le savoir est de demander à Juliette Binoche, car si nous avons unis nos âmes comme je le prétend, elle doit certainement être au courant.

écrivait Timothy Snyder dans The New York Review of Books, le 13 décembre 2013, à propos d'un incident dont quatre ans plus tard Emmanuel Macron n'a pas su tenir compte. Avec les conséquences désastreuses pour la réputation de la parole officielle française. Le professeur Snyder poursuivait :

Or les prétentions de l'Ambassadeur Orlov ne passent pas le test Juliette Binoche. Il peut bien penser que la Russie et l'Oukraïnie ne sont qu'un seul et même peuple. Mais les Oukraïniens ne le pensent pas. 

Timothy Snyder, "Ukraine: Putin’s Denial"

L'Ambassadeur de Russie à Paris, Son Excellence Alexandre Orlov justifiait par avance l'agression à venir contre l'Oukraïne.  Ballon d'essai. A la TV française. Essai réussi. Les sourds n'ont pas entendu. Les aveugles n'ont pas vu venir. Les Français ont gobés. Les Oukraïniens n'ont rien dit. Trois mois plus tard l'anschluss de la Crimée était prononcé, les "hommes polis" (les troupes russes sans signes distinctifs) étaient redisloqués dans l'est de l'Oukraïne, et vive les républiques populaires de ci et de là !

Vladimir Poutine réaffirmera à ce moment l'unicité du peuple russe dispersé, du monde russe martyrisé et humilié. Il reparlera du peuple russe "qui était à genoux et qui se relève enfin". La promesse toute hitlérienne de la revanche historique. De la fierté nationale, mais au prix de la dignité : Krym Nach !

"Les Russes et les Oukraïniens, nous sommes un seul et même peuple." dira alors Vladimir Poutine.

Et le redira à Versailles, le 29 mai 2017, au nez et à la barbe d'Emmanuel Macron : "Но не с поездки царя Петра во Францию началась история российско-французских отношений, она имеет гораздо более глубокие корни.

Просвещённая французская публика* знает о русской Анне – королеве Франции; младшая дочь нашего великого князя Ярослава Мудрого была женой Генриха I и внесла существенный вклад в развитие Франции."

C'est précisément ce Pierre Ier célébré à Versailles qui changea le nom de son royaume moscovite pour Russie, l'Empire russe. Vers 1715, par là.

Autographe de Anna Yaroslavna, 1063
Avec les lettres de l’Evangéliaire de Reims
Et si l'épouse de Henri le Roi des Francs était "russe", elle l'était dans le sens de "ruthène", terme médiéval. En faisant ce tour de passe-passe, Pierre le Grand hâbleur escompte un effet rétroactif. Si je suis la Russie alors la mère des villes russes m'appartient de droit. Anna la Russe, Juliette Binoche, la petite amie de Timothy.

L'imberbe Président français n'a pas vu venir et n'a pas su interpréter ces Anna et Yaroslav russes.

Affirmation tranchée de prétentions impériales. Négation de l'indépendance oukraïnienne.
Le jeune président français s'est laissé égaré dans les détails. Spectacle très déplaisant.

Honte à la lyre hypocrite dont les cordes flatteuses remplissaient d'arpèges les salons de Versailles ! 

Honte aux libres poètes qui devant l'étranger font sonner les anneaux de leurs chaînes librement mises ! L'esclavage est ignoble d'autant plus qu'il est libre.
Lessia Oukraïnka l'a déjà écrit.


* Un euphémisme pour dire perroquets francophones de Poutine.

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